La crise a aussi rebattu les cartes entre différentes circuits de distribution. Les hypermarchés sont les plus fragilisés selon Nielsen. En se concentrant sur le début du confinement (de mardi 17 à dimanche 22 mars), le constat est sans appel pour les hypermarchés, notamment les plus grands hypermarchés (plus de 6500m²) qui reculent de 24%. Les mesures de confinement, qui recommandent aux Français de se rendre dans le point de vente le plus proche de chez eux, favorisent les plus petites surfaces. Seuls 6% des Français vivent à moins de 5 minutes d’un hypermarché. De plus, les hypermarchés sont vus comme des lieux d’affluence et donc de contamination.
Les enseignes spécialisées dans le bio profitent également de la tendance du bio et de leur positionnement de proximité. Chez Naturalia, la fréquentation est plus élevée qu’en temps normal et le panier moyen a augmenté en valeur passant d’environ 40 à 59 euros depuis la mi-mars selon Biotopia, panelists en magasins bio.
Les principales difficultés de ces spécialistes sont les à-coups de la demande, comme par exemple chez Biocoop où, dans une même semaine, l’enseigne a connu une forte volatilité : +6 à +69% selon les jours. Les comportements sporadiques des consommateurs entraînent des réajustements de commandes fréquents, perturbant en cascade toute la chaîne d’approvisionnement.
Enfin, tous les acteurs de la grande distribution se sont engagés pour soutenir les fournisseurs en déployant des offres en magasin pour soutenir des filières à risque, comme les asperges ou les fraises.
Les circuits courts s’en sortent également bien. Les AMAP (Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne) s’organisent pour venir en aide aux petits producteurs, notamment en recensant les petits paysans qui n’ont plus de débouchés pour leurs produits à cause de l’épidémie de COVID-19. En parallèle, les producteurs habituels des AMAP proposent davantage de livraisons. Les chambres d’agriculture développent des solutions innovantes pour trouver des produits frais et locaux en cette période de confinement en Auvergne-Rhône-Alpes. Les producteurs découvrent également les drives fermiers. Aidés par les acteurs du numérique libre, Cagette.net et Open Food France, et soutenus par les collectivités locales, beaucoup de producteurs s’organisent en ligne et depuis chez eux.
Enfin, les services de livraison à domicile et les drives tirent leur épingle du jeu. Selon Nielsen, la croissance de la livraison à domicile réalisée par les distributeurs généralistes atteint 45% sur le premier trimestre 2020, contre 24% en 2019. Confrontés à cette forte hausse des commandes e-commerce, certaines GSA, comme Carrefour et Casino, s’associent aux chauffeurs Uber Eats afin de muscler leur service de livraison de courses à domicile. Quant aux drivers, c’est plus de 500 000 nouveaux foyers en un mois qui ont été recrutés, et 30% pensent continuer après le confinement.
La crise a surtout renforcé des tendances de fond déjà présentes avant la crise avec :
- La montée en puissance des drives et de la livraison, qui obligent les acteurs de la grande distribution à faire évoluer leurs concepts de magasins face à l’émergence des nouveaux acteurs ;
- Le développement des circuits courts et du « manger local », qui, lui, aura un impact sur l’ensemble des filières : de nouveaux débouchés pour les agriculteurs, des nouveaux marchés à appréhender pour les transformateurs, une nouvelle concurrence pour la GMS.